Un retour documenté sur le conflit déclenché en 2014 par la région sécessionniste, avec le soutien de la Russie, qui s’enlise dans ce pays charnière entre l’Est et l’Ouest, minant la présidence de Volodymyr Zelensky et la paix européenne.
En avril 2021, la Russie déploie 100 000 soldats le long de la frontière ukrainienne, où depuis sept ans elle soutient les sécessionnistes du Donbass, entrés en guerre contre le gouvernement de Kiev. Alors que le conflit a déjà causé quelque 14 000 morts, cette escalade vise à rappeler à l’UE et à l’Otan, aux portes desquelles l’Ukraine frappe timidement, qu’un ancrage de l’ex-République soviétique dans le camp occidental constitue pour Vladimir Poutine un casus belli. Ce premier volet va aux racines du conflit, en 2014, retraçant la chute du président prorusse Viktor Ianoukovitch, l’accession au pouvoir de Petro Porochenko et la façon dont Moscou a attisé les divisions pour annexer la Crimée et pousser le Donbass au séparatisme. Il revient également sur l’élection, cinq ans plus tard, de Volodymyr Zelensky, confronté au chantage de Donald Trump, qui le somme de fournir des éléments incriminant le fils de Joe Biden, lequel a œuvré en Ukraine comme consultant, en échange du maintien de l’aide américaine.
Realpolitik
Cet état des lieux très fouillé, qui s’appuie sur un entretien avec Volodymyr Zelensky, mais aussi avec de nombreux observateurs (ukrainiens, russes, français, allemands, américains…) et des citoyens ukrainiens de part et d’autre de la ligne de front, analyse les tenants et aboutissants d’une guerre oubliée qui s’enlise au cœur de l’Europe. Déroulant en archives la chronologie des événements, Claire Walding expose avec clarté l’imbrication des enjeux politiques et économiques qui empêchent le règlement du conflit. Elle montre comment Volodymyr Zelensky, qui par son art du storytelling s’était employé durant sa campagne à brouiller les frontières entre fiction et réalité, a été durement rappelé à l’ordre. Novice en politique, l’auteur et acteur principal de la série à succès Serviteur du peuple, qui a ensuite donné le même nom à son parti afin de faire fructifier la popularité de son héros, s’est engagé à mettre fin à la guerre, à progresser vers l’adhésion de l’Ukraine à l’UE comme à lutter contre la corruption et l’emprise des oligarques. Faute d’avoir avancé sur ces trois promesses, il voit dégringoler sa popularité. Achevé avant le scandale des “Pandora Papers”, dans lequel est apparu son nom (il aurait notamment, juste avant son élection, transféré à un proche ses parts d’un compte offshore dans les îles Vierges britanniques), le documentaire pointe les zones d’ombre et les questions soulevées par sa spectaculaire victoire en 2019. Il souligne surtout combien, face aux visées impériales de Moscou, l’attentisme des Européens compromet la sécurité de tout le continent. Il rappelle enfin qu’au-delà des aléas politiques ce pays charnière entre l’Est et l’Ouest chemine malgré tout vers la démocratie, à laquelle aspire la majorité de ses habitants.